mercredi 5 septembre 2012

Celle de toujours, toute

Si je vous dis : j'ai tout abandonné 
C
'est qu'elle n'est pas celle de mon corps
Je
 ne m'en suis jamais vanté
Ce
 n'est pas vrai 
Et
 la brume de fond où je me meus 
Ne
 sait jamais si j'ai passé

L
'éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux, 
Je
 suis le seul à en parler
je
 suis le seul qui soit concerné 
Par
 ce miroir si nul où l'air circule à travers moi 
Et
 l'air a un visage aimant, ton visage
A
 toi qui n'as pas de nom et que les autres ignorent
La
 mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi, 
Les
 astres te devinent, les nuages t'imaginent 
Et
 le sang de la générosité 
Te
 porte avec délices
Je
 chante la grande joie de te chanter
La
 grande joie de t'avoir ou de ne pas t'avoir
La
 candeur de t'attendre, l'innocence de te connaitre

O
 toi qui supprimes l'oubli, l'espoir et l'ignorance
Qui
 supprimes l'absence et qui me mets au monde
Je
 chante pour chanter, je t'aime pour chanter 
Le
 mystère où l'amour me crée et se délivre

Tu
 es pure, tu es encore plus pure que moi-même.


Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard 

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